Sensible, un peu, beaucoup, passionnément
Je vous rassure, tout le monde est sensible. Cependant, pas au même degré. On peut être sensible un peu, moyennement ou fortement. Ainsi, 30 % de la population serait hautement sensible. Parmi eux, 30 % sont des personnes extraverties (c’est-à-dire qu’elles rechargent leurs batteries en relation). 70 % sont des personnes intraverties (elles rechargent leurs batteries seules, dans leur bulle).
On naît hypersensible. Ce n’est pas une pathologie ni une maladie ni un défaut. C’est un fonctionnement, un état d’être qui fait partie de l’identité, de l’essence de la personne. Une partie serait attribuable à la génétique. L’environnement peut également amplifier ou atténuer ce trait de personnalité. Une personne hautement sensible vit à partir de ses ressentis, et non de sa tête.
Principales caractéristiques
Elaine Aron, psychologue et chercheure en psychologie, est une référence en la matière. Selon elle, voici les 4 grandes caractéristiques de l’hypersensibilité.
1. Traitement en profondeur
La plupart des gens ne voient et traitent qu’une infirme partie des informations sensorielles disponibles dans la vie de tous les jours : le sommet visible de l’iceberg. Cela suffit amplement pour mener une vie épanouie. Inconsciemment, le cerveau de 3 personnes sur 10 observe et analyse l’iceberg au complet, et ce, sans se rendre compte que ce n’est pas la norme. D’où l’impression parfois de décalage. Bienvenue dans la réalité d’une personne à sensibilité élevée.
Cela peut se manifester par :
- des questionnements profonds, fréquents et intenses, verbalisés ou non. Un besoin de sens, une grande capacité d’introspection ;
- une tendance à analyser toutes les possibilités d’une situation ou les informations à disposition ;
- une difficulté ou une lenteur à prendre des décisions ou faire un choix ;
- un retrait dans des situations nouvelles ou face à de nouvelles personnes.
2. Surstimulation
Ce qui semble banal pour la plupart des gens peut provoquer une immense tempête émotionnelle chez une personne hautement sensible. Savario Tomasella, docteur en psychologie, psychanalyste et fondateur de l’Observatoire de la sensibilité parle de phénomène d’amplification. Comme si les ressentis (sensations, émotions, sentiments) sont nourris et agrandis en passant à travers une caisse de résonnance interne. Trop de stimulations provoquent rapidement un inconfort sensoriel puis une saturation.
Cela peut se manifester par :
- une sensation d’envahissement, de débordement (positif ou négatif) ;
- une difficulté à exprimer en mots les subtilités du chaos et de la confusion interne, à soi-même et aux autres ;
- un grand besoin de calme et de repos.
3. Réactivité émotionnelle et empathie
Grâce à une forte activité cérébrale des neurones miroirs et de l’insula, les personnes hypersensibles réagissent davantage émotionnellement et ont une très grande empathie. Elles se mettent à la place de l’autre et ont tendance à absorber leurs émotions. Apprendre à tordre régulièrement son éponge est gage d’une bonne hygiène émotionnelle.
Cela peut se manifester par :
- des pleurs plus fréquents car c’est un moyen de régulation, de décharger les tensions et le trop plein d’émotions, même devant la beauté d’un paysage, l’harmonie d’une mélodie, la douceur d’une caresse ;
- une capacité à percevoir instinctivement les émotions et intentions des autres. Saviez-vous que seulement 7% d’une communication orale passe par les mots?
- un perfectionnisme poussé à l’extrême (et réactions intenses face à l’erreur ou l’échec) ;
- une mémoire émotionnelle (des souvenirs basés sur les sens).
4. Sensibilité aux stimuli subtils
Il s’agit d’une forte attention aux sons, aux odeurs, aux détails, aux matières des vêtements, aux postures et mimiques. Certains sens peuvent être plus développés, sans que les organes ne soient bioniques pour autant. C’est encore une fois le cerveau qui micro-analyse naturellement l’environnement de la personne ultrasensible. Certaines sensations peuvent devenir désagréables, voire douloureuses.
Exemples :
- Une pièce rangée vous apaise. Si c’est encombré, cela joue sur votre moral : vous êtes fatigué, agacé, vous vous sentez envahi.
- Impossible de travailler dans un espace ouvert ou un café car le bruit de fond vous dérange et vous empêche de vous concentrer.
- Certaines textures de nourriture vous retournent le cœur.
- Vous pouvez être plus sensible à la douleur. Vous ne supportez pas certaines matières sur votre peau.
- Certaines odeurs vous sont insupportables et vous donnent envie de vomir.
En conclusion
Comme le résume Fabrice Midal, philosophe et écrivain : « l’hypersensible est bousculé par le trop : trop d’émotions, trop de pensées, trop de sensations, trop d’empathie, trop d’intensité dans sa vie (…) C’est parfois insupportable, c’est aussi souvent exaltant. Car ce trop qui parfois dérange, donne aussi de l’allant. Il est le bonheur d’être vivant. »
Être une personne à sensibilité élevée n’est pas de tout repos. Dans la forêt des différences invisibles, le chemin est parsemé d’ombres mais aussi de lumière. N’oubliez pas que vous avez beaucoup de ressources en vous. Pour en citer quelques-unes : une créativité débordante, une grande capacité d’ouverture, une empathie naturelle, une remarquable lucidité, une intuition puissante, une compréhension rapide des choses, une capacité à réfléchir en demi-teinte plutôt qu’en noir et blanc. Et surtout, vous n’êtes pas seuls.
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Sources
- Ces gens qui ont peur d’avoir peur. Mieux comprendre l’hypersensibilité, Elaine N. Aron, Éditions de l’Homme, 2013.
- Hypersensibles. Trop sensibles pour être heureux?, Saverio Tomasella, Eyrolles Poche, 2022.
- Suis-je hypersensible ? Fabrice Midal, Édito, 2021